lundi 5 avril 2021

Le Christ est ressuscité et la vie règne.

 Grâce au Père Dom Jean Pateau

 

JOUR DE PÂQUES

 

Homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU Abbé de Notre-Dame de Fontgombault

(Fontgombault, le 4 avril 2021

 

Riches et pauvres, exultez ensemble. Abstinents et négligents, honorez ce jour. Vous qui avez jeûné et vous qui n'avez pas jeûné, réjouissez-vous aujourd’hui… Vous tous, jouissez du festin de la foi… Que personne ne se lamente sur sa misère : car notre Royaume à tous est apparu. Que personne ne pleure ses péchés, car le pardon s’est levé du tombeau. Que personne ne craigne la mort, car la mort du Sauveur nous a délivrés. La mort l’a retenu et il l’a étouffée ; descendu aux enfers, Il les a dépouillés… Enfers, où est votre victoire ? Le Christ est ressuscité et vous avez été jetés bas. Le Christ est ressuscité et les démons sont tombés. Le Christ est ressuscité et les anges se réjouissent. Le Christ est ressuscité et la vie règne.

 

Marie, ne me touche pas, je ne suis pas encore monté vers le Père.
 



    Chers Frères et Sœurs,

    Mes très chers Fils,

    Par ces mots, tirés du rite byzantin de la Vigile Pascale, saint Jean Chrysostome, archevêque de Constantinople, s’adressait à son peuple en ce « saint et lumineux jour de la glorieuse et salutaire résurrection du Christ notre Dieu. » Qui que nous soyons, quelle que soit notre vie, implorons le pardon que le Christ nous offre par sa victoire sur le mal, sur la mort. Ressuscitons avec lui et jouissons du festin de la foi. Ces lignes divisent l’humanité. Tout homme qui reconnaît avoir besoin d’un sauveur les reçoit pour son salut. Tout homme qui se suffit à lui-même les rejette pour sa perte. 

En ce saint jour de Pâques, souvenons-nous de la parabole du fils prodigue, appelée aussi parabole du père miséricordieux (Lc 15,11-32). Des deux fils, le plus jeune après avoir exigé sa part d’héritage quitte la maison paternelle pour vivre sa vie. Ayant gaspillé ses biens, il forme le désir de retourner chez son père non à titre de fils, mais comme ouvrier. Au loin, son père l’aperçoit. Il va au-devant de lui, lui pardonne et ordonne que l’on fête son retour. Le fils aîné, revenu des champs, ayant appris la raison des festivités, entre dans une grande colère et refuse de se joindre à la fête. Ni le fils aîné, ni le fils cadet n’avaient compris le secret du cœur de leur père : la miséricorde. L’aîné, par une fidélité étroite à son éducation n’attendait de son père que la justice. Juste, il pensait n’avoir pas besoin de miséricorde. Le cadet avait gaspillé ses biens, son héritage et surtout son éducation. Conscient de sa misère et de sa responsabilité, il ne pouvait prétendre qu’à la condamnation. Quant au père, il n’avait de cesse que de partager son secret, sa miséricorde, avec ses deux enfants. Reconnaissons que chacun d’entre nous tient à la fois du fils aîné et du fils cadet, une dureté intransigeante et une misérable faiblesse. Notre cœur est souvent le lieu d’un terrible combat. Qui nous sauvera du désespoir ? En ce matin de Pâques, le Christ vainqueur domine nos vies. Il domine nos fiertés. Il domine nos misères. Il porte sur chacune d’elles, le baume purifiant, pacifiant et vivifiant de la sainte miséricorde. Déjà, sur le Golgotha, cloué en croix entre deux voleurs, il avait entendu les paroles du bon larron : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » (Lc 23,42) La réponse n’avait pas tardé : « Amen, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. » (Lc 23,43) La miséricorde a toujours le dernier mot. 

Cette nuit, alors que le Christ triomphait de la mort, nous nous sommes réjouis. Ce matin, la pierre est roulée. Le tombeau est vide. En sera-t-il de même pour les tombeaux de nos vies, de nos misères ? Ces tombeaux qui nous emprisonnent ? La fête de Pâques ne se résume pas à l’évocation d’un événement grandiose, au renouvellement des promesses de notre baptême. C’est vrai, nous avons renoncé à Satan, à ses œuvres, à ses séductions. Nous avons professé notre foi en Dieu : Père, Fils et Saint-Esprit ; notre croyance en la sainte Église catholique, en la communion des saints, en la rémission des péchés, en la résurrection de la chair, et en la vie éternelle. Mais tout serait vain si les paroles du bon larron ne jaillissaient de notre cœur : « Jésus, souviens-toi de moi. » Les paroles de l’Ange de la Résurrection adressées aux femmes devant le tombeau reviennent à nos oreilles et nous rassurent : « Vous, soyez sans crainte ! Je sais que vous cherchez Jésus le Crucifié. Il n’est pas ici, car il est ressuscité. » (Mt 28,5-6) 

Soyons donc sans crainte si nous cherchons vraiment le Seigneur, si nous lui demandons de se souvenir de nous. Renouvelées dans le Christ, nous deviendrons cette pâte nouvelle qui fait fermenter la masse. Celui qui communie au Christ ressuscité doit partir en mission. 

Après l’adresse de l’ange, le Christ lui-même vient aux femmes : « Soyez sans crainte, allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée : c’est là qu’ils me verront. » (Mt 28,10) Voir Jésus, être vu par Jésus : voici le dernier pas à accomplir, l’ultime accueil et le plus difficile. Pensons à Pierre et à Judas au soir du jeudi-saint. La richesse, l’idéologie, l’orgueil ferment les yeux et le cœur. Le dépouillement les ouvre. Quelle leçon que ce souvenir d’un prêtre visitant à Erbil les chrétiens d’Irak ayant fui Mossoul et les horreurs de Daech : 

Ils avaient tout perdu en quelques heures parce qu’ils avaient refusé de renier leur foi… Un enfant de cinq ans est allé me chercher son « trésor ». Ils avaient dû fuir à pied Mossoul , chacun emportant une seule chose. De tout ce qu’il possédait, il avait choisi sa Bible illustrée1 .

Et le prêtre de poser ces questions : Est-ce que nous considérons que la foi est notre premier trésor ? Est-ce que nous sommes convaincus que ce qui pourrait nous arriver de pire serait de la renier ou de la perdre ? Recevons ces témoignages venus de nos frères dans la foi, les chrétiens du Moyen-Orient, les chrétiens de Chine trop oubliés et qui se sentent abandonnés. Faisons nôtre en ce jour la joie de Marie. Qu’elle intercède pour nous auprès de Dieu. La promesse est désormais accomplie en celui qu’elle a porté. Le Christ est ressuscité pour sauver le monde.
 
Illustration :  Marie, ne me touche pas, je ne suis pas encore monté vers le Père. Caséine sur toile. 210 x 279 cm. Robert Empain. 2015

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