dimanche 27 mars 2016

Réalité et sortie de nos enfers


Grâce à toi Seigneur Jésus


En ce jour de Pâques, les chrétiens se souviennent qu’après sa mort sur la croix et avant de ressusciter dans la Gloire du Père, le Christ Jésus est descendu aux enfers, ou aux Limbes, pour y chercher les justes, à savoir les hommes et les femmes qui, avant l’Incarnation du Christ, se sont rendus justes par leurs actes durant le temps de leurs existences terrestres.
Il faut aussitôt ajouter que pour les chrétiens les événements de la vie de Jésus Christ :  son Incarnation, sa Naissance, sa Passion, sa Mort et sa Résurrection, ainsi que les sacrements qu’il a institués, sont des réalités éternelles, des réalités vivantes qui ne cessent de se produire dans la Vie éternelle, dans la vraie Vie, la Vie unique et absolue dans laquelle nous vivons, de laquelle nous recevons la vie à chaque instant par amour, et cela même si nous l’ignorons, l’oublions ou le réfutons.


Le Christ aux limbes par Andrea Bonaiuti, dit Andrea da Firenze.
Ce peintre italien fut chargé d’exécuter à Florence, pour la salle capitulaire de la chapelle des Espagnols,
des fresques, dont Le Christ aux limbes, daté d’environ 1366-1368.




Si le Don de la vie nous est donné gratuitement, par une grâce que nous sommes incapables de nous donner à nous-mêmes, chacun de nous, par une autre grâce aussi miraculeuse que la précédente, est libre de faire ce qu’il veut de sa vie. Chacun, en effet, peut librement jouir de sa vie pour lui seul, en faire sa chose, sa propriété, il peut l’avilir, la détruire, la haïr et nier indéfiniment l’avoir reçue. De même, chacun peut encore jouir de la vie d’autrui, il peut l’asservir, l’avilir, la haïr, la faire souffrir et la détruire et même trouver du plaisir à le faire. Mais chacun peut aussi, à l’image du Christ Jésus, reconnaître et aimer la Vie en lui, en chacun et en tous, et vouer sa vie aux autres vivants comme lui et en éprouver une joie indicible. Chacun peut donc librement faire de sa vie un paradis ou un enfer, faire de la vie une joie ou une souffrance, continuelles et réelles, et d’autant plus réelles qu’elles sont éprouvées comme telles.

Les enfers est donc un nom donné à une modalité réelle et souffrante de la vie que nous pouvons réaliser maintenant et éternellement en nous y mettant chacun pour soi et tous ensemble. De même, le paradis est le nom de la réalité vivante qui est la joie qu’il nous est donné de réaliser dans nos vies dès maintenant et éternellement. C’est donc dans les enfers ou le paradis que chacun de nous fait de sa vie qu’il vit maintenant et vivra après la mort de son corps terrestre. 

Les enfers ne se réduisent pas à la réalité apparente du monde qui nous saute aux yeux partout et qui n’est que sa manifestation visible dans le monde ; un monde si terrifiant que Malraux en a dit, après la guerre, qu’il avait donné des leçons à l’enfer ! Car si l’enfer est manifesté dans le monde de manière visible et même de plus en plus spectaculaire, sa réalité véritable n’est pas faite d’images et de mots, mais d’une réalité invisible comme la réalité même de la vie quand elle est faite des souffrances de la multitude des vivants qui subissent l’enfer dans leurs vies mêmes, quand ils éprouvent la faim, la soif, le froid, la maladie, les coups, les viols, les blessures et les crimes dans leurs chairs, quand ils endurent la haine et le mépris dans leurs âmes, quand ils subissent la négation de la Vie dans leurs coeurs. 

C’est donc la négation de la Vie en soi, en chacun et en tous, qui fait la réalité vivante des enfers. 




Enluminure. Livre d'heures de Catherine de Clèves, 1440




Ces lumières, reçues du Christ Jésus et de l’intelligence de Michel Henry, nous aident à mieux saisir le sens de mots chrétiens comme vie, incarnation, souffrance, amour, charité, pardon, compassion, résurrection, descentes aux enfers, ascension...

Ces mots pour un chrétien ne sont pas des paroles en l’air mais les actes d’un homme nommé Jésus qui les a accomplis dans la réalité vivante, invisible et éternelle de sa vie, qui est celle d’une chair semblable à la notre, des actes qui furent manifestés aux yeux de tous dans l’espace et le temps du monde. 
Or, tous les actes de cet homme se concentrent en un seul acte de pur amour : Jésus donne sa vie pour nous sauver de nos enfers et, par ce don, il ressuscite et nous ressuscite dans la Vie éternelle.



Wassily Kandisnky, Jugement Dernier. 1912



Jésus est descendu et descend aujourd’hui encore dans nos enfers, réels, temporels et potentiellement éternels de nos vies ignorantes du Don de l’amour. Par le Don de sa vie et par le pardon donné à tous les hommes, Jésus nous redonne la Vie, il nous renouvelle, il nous ressuscite avec Lui, pour autant que nous voulions de son Don. 

Nous ressuscitant, Jésus nous délivre de la peur et du mensonge qui sont l’origine de notre existence terrestre. Car c’est par le mensonge, le doute, la méfiance et la calcul que nous sommes séparés de la Vie, que nous sommes aux enfers, quand nous en venons à croire que la vie ne nous est pas donnée par amour, mais, qu’au contraire, elle ne pourrait que se perdre en se donnant, ce qui constitue la négation de la Vie, son épreuve infernale.
  
Jésus n’est pas descendu dans l’Enfer des damnés éternels, dans le puits de l’abîme où vivent et vivront éternellement ceux qui nient indéfiniment une Vie qui ne peut que se donner et jamais se reprendre. C'est pourquoi ceux là voudront mourir mais ne le pourront pas. 


Marie, ne me retiens pas, je ne suis pas encore monté vers le Père.
Robert Empain. 2015



Texte : Robert Empain, 26 mars 2016

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