samedi 17 août 2019

Marie, mer que nul n’épuise : plus y trouve qui plus y puise

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ASSOMPTION


Homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU
Abbé de Notre-Dame de Fontgombault

 (Fontgombault, le 15 août 2019)


Beatam me dicent omnes generationes
Tous les âges me diront bienheureuse.
(Lc 1,48)



Pinturicchio e bottega. Assunzione della Vergine, 1508



    Chers Frères et Soeurs,
    Mes très chers Fils,
 
 
    En ce jour béni, émerveillons-nous devant la plus belle des créatures de Dieu, qui, au terme de sa vie terrestre, monte au ciel, corps et âme, portée par les Anges. 
 
    Quel enthousiasme, quels chants d’action de grâces parmi les puissances célestes, alors que leur Reine franchit les portes du Royaume où nous espérons tous un jour pénétrer à sa suite.
 
    À ce moment, Marie notre mère, devient, après le Christ, Porta Cæli, Porte du Ciel pour tous ses enfants.
 
    Si l’Église invite à unir nos voix au chant de louange des anges, elle veut aussi nous associer au Magnificat de l’humble Vierge, couronnée de gloire. Ce cantique, prononcé en réponse à la parole d’Élisabeth : « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur » (Lc 1,45), a comme inauguré une louange qui ne s’arrêtera plus. L’Église, en nous le faisant chanter chaque jour à Vêpres, veut en faire la prière de notre propre vie.

    Si Marie est Porte du Ciel, c’est parce qu’elle a d’abord été Porta aurea, la Porte d’or, que le Christ a franchie pour venir parmi nous.

    Au temps de Noël, l’Église chante :

    Il est descendu des cieux, envoyé des hauteurs du Père. C’est par l’oreille de la Vierge qu’il est entré dans nos confins, revêtu du manteau de pourpre. Et il est sorti par la porte dorée, lumière et splendeur de tout l’univers créé. Comme un époux, le Seigneur sort de la chambre nuptiale.
 
    Commencé par l’accueil de la parole de l’Ange Gabriel et la conception en elle du Verbe fait chair, le chemin de gloire de la Vierge de Nazareth s’est poursuivi par l’acceptation généreuse du plan divin. Marie nous rend le Ciel accueillant. Porte du Ciel pour nous, Porte d’or pour le Christ, elle est encore la chambre nuptiale où l’humanité est réconciliée avec son Créateur.
 
    La gloire de la Mère de Dieu éclate dans la grande vision révélée par l’auteur de l’Apocalypse : Un grand signe apparut au ciel : une Femme ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. (Ap 12,1)

    Revêtue du soleil, Marie est aussi pour chacun d’entre nous l’Étoile de la mer, Stella maris, le phare qui ne s’éteint pas et qui guide avec sûreté le sillage de nos petites barques vers les rivages célestes.

    Ce chemin, Marie l’a parcouru dans l’acceptation de l’instant présent en communion profonde avec Dieu. Lors de la Nativité, elle est silencieuse et conserve toutes choses en les méditant dans son coeur. Aux noces de Cana, elle s’inquiète du vin qui manque et en fait part à son Fils. Quand il est pendu au bois de la Croix, elle est toujours près de lui.

    Chacun de ces instants est porteur d’un double message : Soyez présent à Dieu, et « faites tout ce qu’il vous dira. » (Jn 2,5)
 
    Sur la Croix, Jésus nous a donné Marie pour Mère : « Femme, voici ton Fils. » (Jn 19,26) 
À la suite de saint Jean, prenons Notre-Dame chez nous, dans nos coeurs, dans nos familles et nos maisons.

    Comment nous mettre à l’école de Marie ? Dans une admirable prière, saint Grégoire de Nysse écrivait :
 
    Âme…, tu es la marque de la vraie divinité..., l’empreinte de la véritable lumière. 
Si tu la regardes, tu deviens cette même lumière. (Homélie 2 sur le Cantique des Cantiques - PG 44, 805D)

    Contempler Dieu, ce n’est pas lui parler, l’inviter dans nos projets. Contempler, c’est tendre un regard vers les mystères divins pour se laisser imprégner. Devenir ce qu’Il est. 
 
    La contemplation n’est pas le privilège des moines. Croyez bien que si elle vous paraît difficile, elle l’est aussi pour des moines qui vivent hors du monde. Pourtant, la mesure de notre contemplation est l’exacte mesure de notre communion avec Dieu. Si nous étions de vrais contemplatifs, imprégnés de la lumière de Dieu, comme notre regard sur le monde, et nos relations avec notre prochain, seraient lumineux !
 
    La société moderne ne nous apprend pas à contempler, mais à consommer puis jeter. 
Les mystères de Dieu qui durent éternellement ne peuvent être consommés. Ils sont inépuisables.



La Dormition de la Vierge. Saint Sauveur in Chora. Istambul


    L’homme ne peut que s’y abandonner ou s’en désintéresser. 
Contempler les mystères de Marie, c’est goûter la simplicité du Fiat, la joie du Oui obéissant à Dieu. C’est apprendre à
demeurer dans une espérance sans faille alors que le doute ou l’adversité pourraient troubler nos âmes.
 
    Contempler Marie, c’est admirer en elle la réalisation des titres que lui accordent les litanies de Lorette, ou encore ceux que nos frères d’Orient aiment à lui chanter dans la belle hymne acathiste. « Marie est mer que nul n’épuise : plus y trouve qui plus y puise. » (Gauthier de Coincy)




    Mais que dire à Marie ? Parmi, les prières mariales, il en est une privilégiée : le chapelet. Ouverte par la proclamation de notre foi dans le Credo, elle se poursuit dans une alternance de Notre-Père et de Je vous salue Marie au long des dizaines, dont chacune médite un mystère de la vie de Notre-Seigneur ou de Notre-Dame. Depuis des siècles, cette prière a comblé les plus simples des croyants comme plus éminents Pasteurs, ou les plus savants théologiens. Marie a montré combien elle aimait cette prière en venant l’écouter de la bouche des enfants.
 

    Contempler Marie, c’est apprendre à devenir enfant de Dieu.
 

    Marie, comme le disait Bernanos, est plus jeune que le péché. Elle est immaculée dès sa conception, préservée de la marque du péché de nos premiers parents, indemne de la peste de notre humanité. N’ayant commis durant sa vie terrestre aucun péché, elle est la toute pure, et Dieu s’émerveille devant elle comme au premier jour de la Création. Au contact de la jeunesse de Marie, nos coeurs vieillissants rajeunissent et se renouvellent.

    Nos vies, nos familles, nos communautés, accueillantes à la paix venue du Ciel et offerte aux hommes de bonne volonté, prennent un visage marial, un visage lumineux, accueillant et
attirant. Alors, avec elle, en elle, à notre tour, nous pouvons chanter notre Magnificat et inviter en ce chant les hommes et femmes de notre temps.

    Unissons nos voix à celle de toutes les générations pour proclamer Marie Bienheureuse. Contemplons sans relâche notre Maman du Ciel, pour porter le poids du jour, de la tentation, de l’abattement. Marie est notre mère, proche et aimante, lumière et splendeur de tout l’univers créé, notre gloire et notre joie.
 

Amen, Alleluia.


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